LES CHEMINS DE FER DEPARTEMENTAUX (CFD)
LA GARE DES CHEMINS DE FER DEPARTEMENTAUX D'ANGOULÊME (CFD)
Restée longtemps inconnue du patrimoine ferroviaire de la cité angoumoisine, c’est après de longues recherches qu’un jour enfin elle nous est apparue dans le paysage urbain de la vallée de la Grand Font et de son quartier sur une carte postale datant du début du XXe siècle.
Le choix de la Compagnie des Chemins de Fer Départementaux d’installer cette troisième gare en 1896, dans la proximité des gares PO et ETAT est évidemment une décision purement stratégique. Le quartier de la Grand Font était devenu en l’espace de quelques décennies un secteur économique très actif et incontournable pour le milieu des affaires de la cité. La proximité du Port l’Houmeau et des moyens de s’y rendre par le fer ou par la route était résolu depuis 1883/1883, dates de la création de la voie de la marine pour desservir l’EP militaire. Les possibilités d’échanges commerciaux, avec l’une ou l’autre gare concurrente, devenaient réalisables par la construction de plaques tournantes et de partie de voies communes desservant celles-ci et traversant la voie publique qu’était l’avenue Gambetta.
Un traité d’échange, entre les Chemins de fer de l’ETAT et les Chemins de Fer Départementaux, daté du 15 octobre 1936, précisait les modalités d’échanges des transports à grande et petite vitesse. Il rappelle les orientations passées entre les deux réseaux ferrés, le 27 novembre 1890, soit un an après que les murs de la gare CFD d’Angoulême furent dressés.
Ce document précise de plus, les modes d’exécution des manœuvres avec la Compagnie d’Orléans en ces termes :
« Cette gare de la Compagnie des Chemins de Fer Départementaux est également réunie à la gare de la Compagnie d’Orléans pour la transmission des marchandises de petite vitesse, par l’intermédiaire d’une voie étroite réalisée par l’adjonction d’un 3e rail à une voie transversale reliant la gare de la Compagnie d’Orléans aux emprises des Chemins de fer de l’ETAT.
Les opérations de transmission de Chemins de Fers d’Orléans à Chemins de Fer Départementaux et vice versa, sont effectuées dans les emprises de la Compagnie d’Orléans, conformément aux dispositions prévues par l’arrangement passé le 08 novembre 1916, entre la Compagnie des Chemins de Fer Départementaux et la Compagnie d’Orléans. »


Après la guerre, le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme (MRU), le Ministère de l’Intérieur, la ville d’Angoulême et la SNCF, décident un élargissement de l’Avenue Gambetta au détriment des anciennes gares de l’ETAT et des CFD. Elles ne seront jamais reconstruites et ces décisions sonnent le glas des deux compagnies ferroviaires qui ne s’en remettront pas.
Fonctionnement et Règles de sécurité des CFD sur la section de ligne à voie unique
La ligne Angoulême/Rouillac/Matha est une ligne à voie unique et métrique. Elle sera régie par des règles spéciales à la circulation des trains sur la Voie Unique afin d’éviter que deux trains de sens inverse ne soient engagés simultanément entre deux stations, haltes ou gares et pour prévenir les collisions.
La circulation des trains sur cette catégorie de ligne est donc confiée à un « Agent Spécial » chargé de prendre toutes les mesures de sécurité afin que soient assurées la sûreté et la régularité des circulations et du service.
Cet « Agent Spécial » a autorité sur tous les agents des établissements de la section de ligne sur laquelle il intervient. Lui seul peut apporter les modifications qu’il juge nécessaire ou encore autoriser la circulation d’un train supplémentaire, d’une machine haut le pied, ou d’un train facultatif.
Pour cela, il informe chacune des gares intéressées de ces nouveautés dans la circulation des trains et il n’en autorise l’application qu’une fois qu’il a acquis la certitude que toutes les gares concernées ont bien reçu ses instructions. Pour certains trains, facultatifs, ou spéciaux il existe de plus des règles particulières qui consiste à « demander la voie » à l’autre gare, afin d’accroître la sécurité de leur mise en marche et de leur circulation
La ligne des Chemins de Fer Départementaux ayant son origine à Angoulême fonctionnait ces règles spéciales. « L’Agent Spécial » » responsables de la section de ligne était en poste à la gare de Saint-Jean d’Angély.
Les gares charentaises desservies par les Chemins de Fer Départementaux, étaient, Vénat sur la commune de Saint-Yrieix, Fléac, Saint-Saturnin, Hiersac, Douzat, Asnières/Neuillac, Saint-Amand/Saint-Genis, Saint-Cybardeaux et Rouillac, Beaulieu/Plaizac, Mareuil/Courbillac et Sonneville/Anville. Au-delà, la ligne se dirige vers la Charente Maritime. Ce sont les arrêts de Neuvicq le Château, les Brousses, Siecq, Louzignac et Sonnac/Haimps qui seront desservis par les CFD.
Jusqu’à ces dernières années, il n’existait aucune vue ou photo montrant les bâtiments de cette gare. Les recherches du GRAHT ont permis de situer avec précision son emplacement après une étude minutieuse des cartes postales en notre possession. Elle se trouvait à peu de distance du pied de la passerelle Chaignaud, lieu où se trouvait un pont tournant pour les échanges commerciaux entre le PO et les CFD. (Découverte : Daniel Bernardin – Michel Neau – Yvette et Michel Renaud).
Cette voie ferrée qui traversera la Charente portera le sobriquet de « Petit Rouillac » ou encore « Petit Rouillat ».
Sur l’emprise de l’ancien quartier des gares s’élèveront d’importants bâtiments et logements locatifs. Depuis l’après-guerre, ce quartier ne cessera d’être en perpétuelle évolution.


Le Triage et ses voies de services, se positionnent au nord de l’avenue Gambetta, à peu de distance de la place de la Madeleine. Ce chantier, largement éloignée de la gare des voyageurs se développe autour d’un réseau de huit voies de service destinés à la réception des trains de marchandises et aux manœuvres.
Une cour marchandises, spacieuses était à la disposition des clients du chemin de fer pour les évolutions de charrettes et autres véhicules à moteur. Cette cour bien que nommément mentionné « cour marchandises des CFD » dans les documents, orchestrait les mouvements des clients des réseaux PO et CFD dans leurs activités car les voies de l’une et l’autre compagnie étaient accostables de chaque côté.
Une halle avec ses bureaux ouverts à la clientèle, est installée au centre d’un quai de grande longueur. Cet ouvrage offrait de multiples commodités pour les opérations de chargements et déchargements des wagons. En effet, un quai découvert à chaque extrémité, à la fois desservi par une voie de débord le longeant dans sa totalité, ainsi qu’une voie en cul de sac venant buter contre le butoir du quai, autorisaient les mises en place de wagons rapidement. Il est probable que cette diligence ne pouvait que satisfaire la clientèle du ferroviaire.
Au nord de ce quai, plusieurs plaques tournantes permettaient les échanges avec la compagnie du PO mais aussi de tourner les wagons et machines à vapeur lorsque cela s’avérait indispensable.
Plusieurs voies donnaient accès à la remise des machines installée à l’ouest du plan de voies. Une plaque tournante se rencontrait en avant de l’entrée du dépôt. Il est probable qu’un local technique pour l’entretien des locomotives, ainsi qu’un dortoir pour accueillir les mécaniciens, chauffeurs et chefs de train existait pour le personnel de la compagnie repartant le lendemain de bonne heure.
Un bureau du Service de l’Equipement Voies et Bâtiments dressait sa silhouette dans les voies du réseau PO. Il n’est pas impossible que le choix de cet emplacement soit innocent. Les triages de gare étaient souvent propices aux déraillements dus à des bi-voies ou écartements de rail.
Si le local gérant la main d’œuvre pour réparer les dégâts stationnait dans un proche secteur, la situation s’améliorait dans les plus brefs délais et les pertes commerciales étaient moindres pour l’entreprise.

Au départ de la gare CFD d’Angoulême, le train empruntait l’avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, puis celle du Maréchal juin, jusqu’au quartier de la Madeleine. Puis il longeait la rue de la Madeleine à l’étang. Il passait ensuite par la rue du 8 Mai 1945 et l’Avenue de la République en franchissant le pont enjambant la ligne ferroviaire Angoulême-Limoges où l’on peut toujours constater la présence des rails de la voie dans le bitume. Après avoir traversé la Route de Paris et emprunté la rue de l’Egalité, il pénétrait sur le territoire de la commune de Gond-Pontouvre.
Après avoir traversé l’actuel terrain municipal de pétanque, le train abordait la rive gauche de la Charente pour entrer par un imposant pont ferroviaire, sur la commune de Saint-Yrieix. Cet ouvrage d’art constitué de trois piles maçonnées, une sur chaque rive et une centrale, au milieu du fleuve Charente, est aujourd’hui détruit. Seule ces piles dressées en pierre de taille, subsistent et rappellent le souvenir de cette épopée.
Parvenu sur la rive opposée, le train pénétrait sur la propriété du logis de l’Houmelet. Un pont métallique construit au-dessus d’un bras de rivière, possédant deux piles de même construction que le pont sur la Charente, soutenait un tablier métallique. Sur la propriété, afin de franchir le terrain marécageux, fut érigée une plateforme sur laquelle courait la voie. Dans le corps de ce terre-plein, fut percé un passage piétonnier, pont de servitude pour les bêtes allant pacquer dans les prairies environnantes et les piétons désirant se rendre sur les berges pour aller pêcher ou se baigner au lieu-dit « bain du curé ».
A gauche de ce passage, fut aménagé dans le corps de cette terrasse, un escalier pour les besoins du service entretien de la voie des agents du CFD. Régulièrement, ce personnel venait probablement débroussailler et élaguer la végétation très abondante dans cette zone particulièrement humide.
Après avoir traversé la propriété, la ligne filait droit vers l’ouest, en direction de la station de Vénat. Ici le train entamait une grimpette qui s’achèverait à cette halte, puis ensuite, en suivant le plateau, il se dirigerait vers la gare de Fléac.
A partir de cet arrêt, le train quittera les faubourgs de la ville d’Angoulême et se rendra à Linars pour poursuivre son trajet jusqu’à Rouillac

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Avant sa destruction, elle détenait un certain charme. Au-rez-de chaussé se trouvaient le bureau du chef de station et une salle d’attente. L’étage renfermait le logement du chef de gare et de sa famille. Le plan type présenté en bas à droite correspond à l’élévation de la station de Vénat.
Les installations de sécurité de Vénat correspondaient à celles d’une gare type des gares CFD de la section de ligne Angoulême-Rouillac. Elles se composaient, comme on peut le remarquer sur les quelques cartes postales prises après sa destruction par les troupes allemandes, d’une voie directe et d’une voie d’évitement.
Elle ne possédait pas de grue hydraulique ni de château d’eau. Une petite halle se trouvait sur un quai haut à une extrémité du bâtiment voyageur et un lieu d’aisance se positionnait semble-t-il de l’autre côté. Quelques variantes pouvaient exister. Le plan inversait alors la position de la halle et du quai que l’on retrouvait à la place du cabinet d’aisance. Celui-ci était alors établi du côté opposé.
Un cartouche élevé sur la façade au-dessus d’un cordon séparant L’étage du rez- de-chaussé indiquait le nom de la gare. Celui-ci pouvait être de couleur ocre ou bleue.

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Une fois le train reparti de la station de Fléac, il s’acheminait sur Linars, franchissait la Nouère sur un petit pont de pierre et rejoignait les voyageurs qui attendaient à la halte de Chevanon. De nos jours, il n’existe plus aucun vestige de ce passé. Les travaux de la ligne LGV ont défiguré le paysage local et le pont a été détruit pour faire place au tracé de cette ligne ferroviaire à grande vitesse.
Les photos prises par notre regretté ami Jean-Paul Rebeix, qui avait suivi la progression de ces travaux titanesques montrent l’ampleur des aménagements apportés et de ses conséquences sur l’environnement.
La station suivante était celle de Saint-Saturnin, qui était dotée d’un matériel indispensable au mécanicien et à son chauffeur pour poursuivre sa route vers Rouillac. Un château d’eau permettait de faire le complément en eau indispensable au fonctionnement de la chaudière et à la poursuite du voyage.

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Située entre Angoulême et Rouillac, Saint-Saturnin bénéficiait d’un intérêt stratégique pour la compagnie des CFD. Outre son rôle de gare de ravitaillement pour les locomotives à vapeur, le territoire de la commune possédait plusieurs secteurs économiques justifiant les installations qui la composaient, notamment la grue hydraulique. En effet, entre Linars et Saint-Saturnin se trouvaient les minoteries installées aux hameaux de « Chez Marteau » et de « Chevanon », une usine à papier à « Trois Palis », ainsi que les carrières de pierre de « Puybertier » et du « Bois de Laroche ».
Les Chemins de Fer Départementaux comprirent le double intérêt que représentait l’implantation de la station de Saint-Saturnin à cet endroit.
Saint-Saturnin était une gare typique du modèle CFD. La station était dotée de deux voies de communication et permettait un croisement en ligne. Une voie en cul de sac devait desservir le quai et la halle marchandises.
L’architecture du bâtiment voyageur est la même que celles décrites précédemment.
Au-delà de cette station nous quittons le territoire du Grand Angoulême, mais la ligne de chemin de fer poursuit sa route jusqu’à Rouillac et Saint-Jean d’Angély, Mais ceci est une autre histoire qui se poursuit dans notre ouvrage « Il Etait une Fois dans l’Ouest - Les Chemins de Fer A Voie Métrique Etroite » »