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ANGOULÊME - CATHEDRALE SAINT-PIERRE - "LA FRISE DE ROLAND"

EPOPEE CAROLINGIENNE EN ANGOUMOIS

La cathédrale primitive d’Angoulême, dédiée à Saint-Saturnin, fut d’après Adémar, évêque de notre cité en 1076, consacrée par Grégoire, évêque de Tours, et Saint-Germain, évêque de Paris en l’an 570.

Mais, c’est à l’illustre Girard II, évêque d’Angoulême en 1101, que l’on doit sa réédification vers 1110. Elle sera à nouveau consacrée en 1128. A l’exception de la coupole ouest, toute l’architecture est son œuvre, indique l’abbé Michon dans sa Statistique Monumentale .

Qui était Girard II ? Nous savons qu’il est né à Blaye dans le diocèse de Bayeux, peut-être en 1060. Issu d’un milieu misérable, il fera preuve d’une volonté farouche pour améliorer sa condition sociale. Homme ambitieux, plein de zèle, doué d’une grande intelligence, possédant un esprit fertile, infatigable dans ses fonctions, il deviendra à force d’opiniâtreté un élément indispensable de la politique des papes. Nommé légat du Pape, il sera le loyal serviteur des Papes Pascal II, Gélase, Calixte et Honorius. Un différend politique opposant l’Empereur germanique Henri V au Pape Pascal II, au sujet de l’investiture des dignitaires de l’église, le propulse sur le devant de la scène politique et religieux au concile de Latran le 18 mars 1113. Grâce à son intelligence, il démêle l’imbroglio diplomatique dans lequel s’empêtre le concile. Il se porte volontaire pour faire fléchir l’Empereur et permet ainsi la libération du Pape Pascal II, captif d’Henri V .

Girard II fait parti de ces intelligences exceptionnelles qui forcent l’admiration et renversent les situations jugées inespérées. C’est avec le même zèle et cette foi indéfectible, que s’érigeront sous sa direction, de magnifiques monuments religieux en Charente. Son œuvre sera grandiose. Les abbayes de Grosbot en 1121, Lanville en 1122 s’élèveront dans la campagne charentaise. Mais son œuvre maîtresse sera la construction de la cathédrale d’Angoulême, dont il sera le grand architecte.

Ce n’est pas une coïncidence si la décoration de la façade, évoque sur certains panneaux la facture de la célèbre tapisserie de Bayeux. Originaire de cette région, il a vu la broderie de la Reine Mathilde et cette connaissance artistique lui donne l’idée de réaliser dans la pierre, sous une voussure située à droite du portail d’entrée de la Cathédrale, une frise connue sous le nom de « Frise de Roland ». L’histoire normande voudrait que « Turold », personnage nain soit l’auteur présumé de la célèbre chanson de geste, la « chanson de Roland ».

Ce choix poursuit deux objectifs. Un but artistique, destiné à embellir le monument qui s’érige, mais surtout une orientation politique qui rappelle que la chrétienté mène contre l’hégémonie musulmane en Espagne, une lutte sans merci.

Girard II, légat du Pape, est l’organisateur des croisades en Aquitaine. C’est à lui de regrouper les forces armées et de les envoyer combattre auprès des rois catholiques espagnols, luttant pour la Reconquista. La reconquête de l’Ibérie et la libération du tombeau de l’apôtre Jacques, patron de l’Espagne, furent pour la chevalerie d’Aquitaine, sa quête du Saint-Graal. La croisade d’Espagne permettait au chevalier qui s’engageait dans une telle expédition, de s’approcher des lieux saints pour la plus grande gloire du Christ et communier spirituellement avec lui, afin de parvenir jusqu’à lui et toucher le Saint-Graal. Ainsi à sa manière, Girard II participa, au travers de l’esprit chevaleresque et artistique de son époque, à la diffusion des orientations politico-religieuses souhaitées par le Saint Siège, mais la « restauration » de l’Espagne, comme la nomment les textes contemporains est une entreprise purement espagnole.

En utilisant comme support la culture littéraire et philosophique du Moyen Age, la « Frise de Roland » nous montre combien était fine l’intelligence de cet homme. Nul doute que ce fut un excellent moyen de propagande auprès du peuple imprégné de superstitions religieuses, dont les armées chrétiennes avaient un grand besoin.

La « Frise de Roland » à l’époque de sa réalisation devait transmettre plusieurs messages afin de sensibiliser manants et grands seigneurs sur la nature divine de la royauté, l’autorisant à exercer sa fonction de ministre de Dieu. Elle interpelle le regard et lui transmet comme une prière le message de Dieu. Le bandeau de la « Frise de Roland » est porteur d’une orientation politique importante « La Croisade », d’une signification profondément religieuse « la Christianisation de l’Espagne », immortaliser une œuvre artistique et littéraire « La Chanson de Roland » d’une démarche diplomatique « Renforcement des liens d’Amitiés entre l’Espagne chrétienne et le Duché d’Aquitaine » et souveraine « Le sacre et la consécration par l’onction », des rois de France lors de la cérémonie du couronnement, après lequel les seigneurs devaient faire hommage et jurer fidélité au roi.

L’Orientation Politique et Religieuse de la « Frise de Roland »

Légat du pape Gélase II (1118-1119), Girard participa en Charente à l’organisation des campagnes militaires espagnoles et très certainement en Terre Sainte, dans toute l’Aquitaine. Il joua un grand rôle au Concile de Toulouse, en 1118, qui décida de l’aide à apporter à la Reconquista espagnole .

Celle-ci permit à Alfonse VII, roi de Castille et Léon, engagé dans la lutte armée contre l’envahisseur arabe, de reprendre cette même année la ville de Saragosse. La sculpture de la frise, semble selon notre point de vue, être la représentation des batailles de Saragosse et Cutunda, lors des croisades d’Espagne.

Saragosse (778 et 1118) -

La première bataille de Saragosse, retrace la prise de cette cité par Charlemagne, comme le raconte le texte de la Chanson de Roland. Nous savons que sa rédaction se situe entre les années 1100 et 1125, selon les recherches effectuées par les experts, sur le document original retrouvé au siècle dernier . Girard ne pouvait pas méconnaître cette œuvre grandiose, narrant des épisodes guerriers de la Première Croisades d’Espagne de 778.

La reprise de Saragosse en 1118, marque le rôle primordial joué par Girard II au concile de Toulouse.

Cutunda (1120)

C’est probablement le légat du Pape, qui conseilla Guillaume IX le Troubadour, duc d’Aquitaine, à se croiser pour l’Espagne, pour la libération du tombeau de l’Apôtre Jacques. Frappé d’excommunion, il doit racheter sa conduite indigne, punie par l’Église .

Parvenu en Espagne, Guillaume s’inspira peut-être de la Chanson de Roland pour remporter une importante bataille, à Cutunda.

Pour Girard II, la Chanson de Roland fut un outil de propagande et l’indispensable vecteur de la politique de reconquête de l’église chrétienne sur la religion musulmane. Au travers de l’interprétation artistique de la Frise, Girard personnifia le rôle occulte qu’il joua sur la scène politique, en prêchant la croisade à Toulouse et en croisant le Duc d’Aquitaine, Guillaume IX le Troubadour. Homme puissant et ambitieux, qui aimait briller, fin diplomate et habile manipulateur de la pensée et de la volonté des grands seigneurs, il donnait à sa charge une dimension divine et se plaçait entre Dieu et les hommes.

Renforcement des Liens d’Amitiés avec l’Espagne Chrétienne

Comme le signale Charles Daras, dans son ouvrage « l’Orientalisme dans l’Art roman en Angoumois », après l’obscurantisme de l’an mil, la chevalerie finit par faire taire ses rivalités et des unions entre les princes français et espagnol vinrent consolider les liens unissant notre pays aux royaumes d’Espagne . L’organisation des croisades, qu’elles furent de Terre Sainte ou d’Espagne, amena la paix dans le royaume. Des unions vinrent souder les accords politiques entre les grands seigneurs. C’est ainsi que Almodis de La Marche deviendra comtesse de Barcelone en épousant en 1053 Raymond Béranger Ier comte de Barcelonne et que le duc d’Aquitaine unira ses filles avec Alphonse VI de Castille, marié vers 1069 avec Agnès d’Aquitaine et l’infant Pedro Ier d’Aragon qui épousera Agnès, fille de Guillaume VIII d’Aquitaine dit « Guy-Geoffroy, et qui deviendra reine d'Aragon et de Navarre (1072-1097).

Guillaume IX, épousa en 1094, Philippa de Toulouse, veuve du roi aragonais Sanche-Ramire, tué à Huesca, et resta quelques temps en Aragon. Par sa sœur, il sera beau-frère d’Alphonse VI de Castille. Son père, Guillaume VIII, était lié avec le Roi Sanche-Ramire d’Aragon. Il participe à l’expédition de 1064, où fut saisi à l’émir de Saragosse l’opulent alcázar de Barbastro, renfermant un riche butin.

Guy Geoffroy ou Guillaume VIII, obtint par son mariage avec Audéarde de Bourgogne, nièce de Saint-Hugues, le soutien du Saint-Siège et de la Grande Abbaye de Cluny. La prise de Barbastro aura un énorme retentissement dans le monde chrétien. Les clunisiens embelliront probablement cette conquête, afin de mobiliser les grands seigneurs pour des croisades d’Espagne, en les alléchant avec les richesses à prendre aux Arabes.

La Signification Religieuse, Artistique et Littéraire de la Frise

La « Frise de Roland » et les innombrables reproductions artistiques sur le thème de Roland, de Charlemagne et d’Olivier que l’on retrouve sur les édifices religieux, proviennent de la littérature médiévale, mise en scène par les trouvères et les troubadours. Leur source commune est la Chanson de Roland [Le thème de la frise de Roland sur la façade de la cathédrale d’Angoulême ne provient pas de la Chanson de Roland, mais du Pseudo-Turpin élaboré à Compostelle à partir des années 1090 et qui détaille le combat de Roland et du géant turc Ferragut à Nájera. Roland ayant appris que le seul point faible du géant était son nombril lui porta le coup fatal lors du combat singulier qui les opposa. C’est ce qui est représenté à Angoulême ainsi que sur l’un des chapiteaux du palais des rois de Navarre à Estella. Lorsque le Pseudo-Turpin commence à être écrit, la Chanson de Roland n’existe pas encore, du moins sous sa forme écrite. Il faut donc finement dater la frise sur la façade, car elle peut être postérieure à la consécration de l’église, afin de repérer la diffusion du texte compostellan]. Porteuse de messages religieux et guerriers, elle répondait à une attente populaire. Roland servit l’idéal chevaleresque qui enflammait la féodalité. Il personnifia la main de Dieu, tenant l’épée de justice qui s’abattait sur les infidèles, auprès des couches humbles de la population. Cette signification religieuse se transmit principalement en France et dans le Nord de l’Espagne. Elle suivait les itinéraires des chemins de Saint-Jacques et le Camino Francès en Espagne.

De nombreuses cathédrales, abbayes, églises, fontaines et autres lieux saints furent associés au thème de Roland. Nous pouvons presque affirmer aujourd’hui que les manifestations artistiques de nos églises ainsi que celles du Camino Francés en Espagne, ayant pour support littéraire la Chanson de Roland et le Pseudo-Turpin, sont un balisage médiéval, s’adressant aux pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle. Pour cela nous n’avons qu’à lire et écouter les légendes locales, regarder les monuments portant des sculptures, des boiseries, des statues, des stèles ou des gravures, personnifiant les héros de la Chanson de Roland.

Nous avons sous les yeux les magnifiques preuves matérielles, que nous ont laissés les sculpteurs, tout comme nous avons la joie d’écouter ou de lire les merveilleuses légendes carolingiennes qui nous ont été transmises à travers les siècles par les conteurs.

Si nous pouvions remonter le temps, il est probable que nous rencontrerions les auteurs de ces monuments artistiques, les compagnons des devoirs, comptant parmi les premiers pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle, comme nous l’avons constaté au cours de nos recherches à la commanderie templière des Epeaux, en Haute Saintonge.

L’Œuvre Artistique de la Frise de Roland

Jusqu’à ce jour, les chercheurs et historiens ont observé la frise de Roland comme une scène unique montrant une joute guerrière devant une citadelle assiégée, Daroca ou Sarragosse . Nous avons orienté notre étude sous un angle différent en divisant la frise en trois panneaux distincts relatant différents épisodes se déroulant à des époques différentes mais reliés symboliquement par superpositions. Nous proposons de lire cette fresque sous la forme d’un triptyque ou chaque panneau narre le récit d’exploits de personnages de haut rang en des lieux parfaitement reconnus, devant des citées visitées par le grand empereur Charlemagne. Il a probablement voulu signaler son rôle et celui de la cité d’Angoulême dans la lutte contre l’envahisseur musulman en Espagne, tout au long de la Reconquista, dans la réalisation du panneau de droite, qui montre une citadelle.

Par cette sculpture, l’évêque Girard rendait un hommage suprême à ces preux chevaliers, en les immortalisant dans la pierre.

La frise montre un combat de cavaliers luttant deux à deux. Cette joute guerrière représente des événements qui se sont déroulés au Sud de la France.

Un étendard planté dans le sol, symbolise la croisade. Lorsque l’on examine la façade de la cathédrale, on remarque qu’un vent en provenance du Sud, agite la toile de l’oriflamme. Ce détail est une nouvelle référence à l’Espagne ?

Panneau de gauche - « Roland et Ferragut », « Turpin/Girard II d’Angoulême et Abîme »

Deux chevaliers se faisant face, portant un haubert pointu s’affrontent en combat singulier. Ils sont sculptés dans une attitude rappelant les motifs décoratifs de la tapisserie de la Reine Mathilde à Bayeux. L’un perce de sa lance l’abdomen de son ennemi qui, désarçonné, va tomber au sol, comme l’indique sa position en déséquilibre. Sous la violence du choc, il s’incline en arrière, ses pieds ont quitté les étriers et l’on sent bien qu’il va choir au sol. Les destriers se déplacent au galop et celui dont le maître est mortellement blessé se cabre légèrement. Cette scène est sensée représenter le combat décrit dans la Chanson de Roland, mettant aux prises l’archevêque Turpin et l’ennemi arabe Abîme. Ainsi parle la Geste :

« L’archevêque engage la bataille et monte le cheval qu’il a pris à Grosaille : c’était un roi qu’il tua au Danemark. Son destrier est agile et rapide ; il a les pieds fins, les jambes plates, les cuisses courtes et la croupe bien large, les côtés longs et l’échine bien haute, la queue blanche et la crinière jaune, les oreilles petites et la tête fauve. Il n’y a pas de bête qu’il lui soit comparable. L’archevêque l’éperonne bravement et n’a de cesse d’attaquer Abîme. Il va le frapper de son écu d’émir tout couvert de pierres, d’améthystes, de topazes, de cristaux et d’escarboucles qui brillent. Il le tient de l’amiral Galafanes, il l’a reçu du diable à Val-Métas. Turpin le frappe et ne l’épargne point. Après ce coup, l’écu ne vaut plus un denier. Il lui tranche le corps de par-en-par et l’abat sur le terre nue. Les Français disent : « L’archevêque est un preux, avec lui la croix est bien gardée. » »

Or sur ce point La Chanson est formelle, Turpin tue Abîme non point avec un épieu mais avec son épée. Nous préférons y voir la personnalité de Girard II, évêque d’Angoulême, menant son combat contre les infidèles. Cette scène mythologique de Turpin luttant contre Abîme ne pourrait-elle pas glorifier le légat du Pape dans sa lutte acharnée contre les Sarrasins d’Espagne.

Tout un symbolisme religieux se dégage dans cet affrontement. C’est la rencontre du bien contre le mal. Abîme signifie l’enfer, un univers malsain, mauvais, glauque, royaume du diable. Abîme, champion du malin, est défait par la vrai religion, la pure, l’unique, la seule détenant la vérité et qui vainc son ennemi avec l’aide de Dieu. Le moine guerrier, le chevalier vainqueur, porte la cape qui flotte dans son dos. On s’attend presque à y découvrir une croix référence des Templiers. Tout dans ce personnage reflète une belle assurance, sa noblesse, son bon droit, comme s’il était certain de sa victoire. Aucune hésitation ne retarde son geste sûr.

C’est la lutte du bien contre le mal : Turpin/Girard d’Angoulême, un même combat, l’anéantissement des Musulmans. La Chanson de Roland et la frise ne sont que l’aboutissement artistique d’une politique de reconquête, dont le but et de frapper les imaginations, afin que grossissent les rangs des armées partant à la croisade, pour délivrer le tombeau de Saint-Jacques à Compostelle. L’art et la littérature médiévale au service de la politique et de la guerre. Nous n’avons pas inventé la propagande, il suffit de regarder, de lire le message ciselé dans la pierre et d’en diffuser le contenu dans les pensées. Un bon sermon, clôturait un office religieux habilement orchestré, pour s’attirer une nouvelle conscription de recrues. Ainsi devait probablement agir des prêtres dépendant de Girard II d’Angoulême à la fin de la messe dans leurs églises.

Panneau central - « Charlemagne contre Aigolant/Balaak/Marsile »

« Charlemagne à Saragosse et Carcassonne » « Les Ducs d’Aquitaine à Barbastro et Cutunda »

Il met en scène deux événements distincts et malgré tout complémentaires, auxquels se mêlent plusieurs interprétations possibles. Un combat se déroule au pied d’une cité fortifiée. Il faut voir dans cette œuvre, deux affaires différentes et malgré tout similaires qui ont pu se dérouler en deux lieux différents. Expliquons à présent notre propos, nous voyons une bataille et des femmes dont une tombe à genoux en guise de repentir ou en pâmoison.

A partir de ces détails, seulement deux villes peuvent prétendre être celles de la Frise de Roland. Une se trouve en France, c’est Carcassonne tenue par Balaak, l’autre en Espagne et il s’agit de Saragosse qui a Marsile pour roi. Seules, ces deux cités où des femmes jouent un rôle légendaire, se retrouvent impliquées à la fois dans les légendes carolingiennes et les croisades médiévales. Toutes deux sont détenues par les Arabes.

Les combats pourraient être une évocation de la rencontre des armées chrétiennes et musulmanes sur quatre champs de bataille différents. Il préfigure la reddition des villes de Saragosse et Carcassonne par Charlemagne puis Barbastro et Cutunda par les ducs d’Aquitaine Guy-Geoffroy Guillaume VIII, Guillaume IX le Troubadour et leurs alliés.

La rencontre entre les deux cavaliers est plus mouvementée à la lecture des images. Dans cet épisode nous assistons à une poursuite. Le cavalier, portant tête couronnée, frappe son adversaire d’un coup d’épée d’une telle violence qu’il le déséquilibre. Celui-ci paraît blessé, l’attaque qu’il porte échoue dans le vide. Son épieu n’entame pas la cuisse du chevalier portant une longue cape déployée. Celle-ci dévoile avec quelle fougue il porte sa charge pour atteindre son adversaire.

Panneau de Droite - « La citadelle assiégée ou la Cité des Femmes »

Première Hypothèse : Angoulême

Avant de développer notre point de vue sur les personnages féminins impliqués dans cette évocation, nous souhaitons émettre une hypothèse qui ne nous semble pas dépourvue de sens. En effet nous soupçonnons l’évêque Girard II, légat du Pape, d’avoir voulu matérialiser le rôle et l’engagement politique, de la cité comtale d’Angoulême en Espagne, durant la Reconquista. Ce troisième volet montre une cité fortifiée, une porte de ville et des remparts crénelés. Nous pensons que cette scène évoque les cités d’Angoulême, comme nous venons de le signaler, de Saragosse et de Carcassonne. Les trois en une, matérialisent une action militaire.

Dans la cité apparaît une femme à l’entrée d’une maison. Dans l’encadrement de la porte du château, un personnage chauve, probablement un clerc ou un moine. Il paraît se recueillir et se tient en arrière de la scène. Un personnage revêtu d’une tunique non plissée, qui ne descend pas au-dessous du genou, tombant en arrière incline et tourne la tête légèrement vers la muraille. Que penser ? Trois autres personnages, debout, portant le même vêtement, se tiennent à proximité. La particularité est que l’un d’eux possède une arme, probablement un arc. Sa corde est tendue et elle semble prête à décocher sa flèche dans la direction des assiégés. Dans la forteresse on aperçoit une silhouette qui assiste comme témoin à la scène. Est-ce une femme qui pourrait être l’épouse du personnage tombant en arrière ? Cette scène symbolise la résistance d’une cité importante qui est assiégée.

Que devons-nous en déduire. Seuls, l’évêque Girard II et l’artiste de la Frise pourraient nous renseigner. Nous allons tenter d’émettre plusieurs hypothèses qui pourront peut-être nous éclairer davantage, sur les personnages des deux scènes de ce tableau.

Seconde Hypothèse : Saragosse

La sculpture pourrait évoquer la prise de Saragosse par Charlemagne comme certains auteurs l’ont déjà dit. Il s’y déroula effectivement de terribles représailles, destinées à venger la mort de Roland et des douze pairs du royaume. S’il est exact que la reine musulmane Bramimonde est l’un des personnages féminins de la Chanson de Geste, elle ne prit à aucun moment les armes, et ne participa ni à la défense, ni à la résistance de sa ville. Voici ce que nous enseigne la chanson :

« La chaleur est grande ; la poussière s’élève. Les païens s’enfuient et les Français les pressent. La poursuite dure jusqu’à Saragosse. Au haut de sa tour est montée Bramimonde et, avec elle, ses clercs et ses chanoines, - ceux de la fausse loi que jamais Dieu n’aima, et qui n’ont pas reçu les ordres ni la tonsure. Quand elle voit les Arabes en telle déroute, à haute voix elle s’écrie : « Mahomet ! à notre aide ! Ah ! noble roi, nos hommes sont vaincus ! L’émir est mort honteusement. » Quand Marsile l’entend, il se tourne vers la muraille et se met à pleurer ; sa tête s’incline ; il meurt de douleur. Comme le péché l’accable, il donne son âme aux pires démons. Les païens sont morts ou en fuite, et Charles a gagné sa bataille. Il abat la porte de Saragosse. Il s’empare de la cité, y fait entrer ses troupes qui, par droit de conquête, y couchent cette nuit-là. Le roi à la barbe chenue est rempli de fierté. Et Bramimonde lui a rendu les tours, les dix grandes et les cinquante petites. Il réussit bien, celui que Dieu protège. »

Nous le constatons, le texte original est formel, elle est résignée et désemparée devant la défaite et la mort de son prince. Une autre légende à notre connaissance se rapproche étrangement de la sculpture de la Frise de Roland, c’est l’hypothèse numéro deux de notre étude.

Troisième Hypothèse : Carcassonne

Comme le dit si justement Charles Daras dans l’ouvrage déjà cité, peu de villes au Moyen Age avaient un aspect aussi curieux que notre bonne ville d’Angoulême. Si au XIXe siècle, on ne lui avait fait subir de sévères mutilations et enlever son caractère médiéval, Angoulême n’aurait rien à envier, à la fameuse cité de Carcassonne. Ce qui nous laisse entendre, que Girard II à bien voulu représenter la forteresse d’Angoulême dans cette symbolique, car les deux villes ont souvent été comparées d’un point de vue militaire, par leur aspect défensif.

Il ne savait pas si bien dire, car cette seconde hypothèse à pour théâtre Carcassonne ou Dame Carcas, princesse sarrasine, assura la défense de sa ville, alors que Charlemagne campait sous les murs avec ses armées. L’évêque Girard II et l’artiste qui sculpta la frise, connaissaient la légende de Dame Carcas. Cette femme intelligente usa d’un stratagème dont seule la gent féminine a le secret. Le grand roi fut trompé et Charles se reconnut vaincu. Lors de la signature du pacte de Paix demandé par la Dame, Charles sut reconnaître en elle une femme intelligente et décida de lui laisser la ville après son baptême, puis il lui donna un époux chrétien. Voici le seul cas à notre connaissance, ou en ces temps reculés, une femme prit en main les destinées de sa cité, guerroya contre un roi puissant et craint de tous, puis le força à négocier.

Voici ce que nous conte la légende

« La cité était alors occupée par les arabes, quand Charlemagne décida de les chasser et commença le siège de la ville ; très vite, il fit prisonnier le Roi Sarrasin Balaak, qui fut tué sur son refus d'embrasser la foi Chrétienne. Alors, intervient Dame Carcas son épouse.

Le siège durait depuis 5 ans et la famine avait fait périr presque tous les soldats. Dame Carcas releva pourtant le courage des assiégés et décida d'user d'un stratagème.

Elle fait apparaître aux tours de la Cité des hommes de pailles, servantes et serviteurs munis d'une arbalète, courant continuellement à l'intérieur des murailles. Elle ne cessa de décrocher des traits sur les ennemis.

De plus, dit-on encore, après avoir ramassé les bonnets des morts, elle se montra ici avec un rouge, là blanc, ailleurs avec un gris ou bleu, ce qui fit croire aux ennemis que la ville regorgeait de soldats !

Se voyant pourtant réduite à l'extrémité par le manque de vivre, elle poussa l'astuce encore plus loin : elle fit avaler au dernier cochon restant le dernier demi-sac de blé, et jeta l'animal du haut du rempart.

Stupeur ! En heurtant le sol, la pauvre bête éclata, montrant à l'armée de Charlemagne que la ville était abondamment pourvue de blé, puisqu'on en donnait à manger même aux pourceaux...

Charlemagne leva enfin le siège ; cependant Dame Carcas voyant défiler les troupes du haut des remparts, donna l'ordre de sonner les trompettes pour rappeler Charlemagne en vue d'un entretien. De sorte que les soldats crièrent à l'empereur : "Sire, Carcas sonne ! " et de là dit-on est venu le nom de Carcassonne.

Dame Carcas soumit alors sa ville et sa personne à Charlemagne, et se fit chrétienne. Charlemagne, admirant son astuce et son courage, voulut qu'elle demeurât la maîtresse de la ville, et, après son baptême, lui donna pour époux un gentilhomme d'illustre race qui suivait son armée : ce fut le fondateur de la dynastie des Trencavel.

C'est ainsi que la légende prête à une dame l'origine du nom de Carcassonne ».

La sculpture que nous pouvons admirer sur le panneau central de la façade de la Cathédrale pourrait relater le combat qui se déroula entre Charlemagne et les souverains, Marsile, époux de Brasimonde et le mari de Dame Carcas, le roi sarrasin Balaak, qui furent occis par l’empereur. Les cités de la frise se rapporteraient alors celles de Saragosse et de Carcassonne. Reconnaissant l’autorité de Charles, elles se soumettent, et les reines repentantes choisissent de se convertir au christianisme.

Pour conclure nous ne pouvions fermer cette narration sans évoquer un passage de la chronique Saintongeaise qui raconte la retraite de Charles après la défaite de Roncevaux et qui semble confirmer cette hypothèse.

« Dieu que ma peine est grande. Roland mon cher neveu, mon brave et sage Olivier, Turpin l’Archevêque et les neufs pairs du royaume, je les ai perdus. Que n’ai-je écouté les présages, plutôt que me fier aux perfides paroles de Ganelon. »

Le traître qu’il vient d’apercevoir, suit la longue procession, enchaîné sur un cheval de bât. Charles pour l’humilier davantage en a donné la garde à Bégon, le chef de ses cuisines, et à cent de ses gens.

La veuve de Marsile, Roi de Saragosse, Brasimonde, le suit à quelques distances. La belle païenne est cernée d’un bataillon de gens d’église qui depuis les monts d’Espagne lui enseignent la religion chrétienne. Evêques, chanoines, moines et clercs l’exhortent à renier Mahomet, et à demander le pardon de ses fautes pour la conduire sur la voie du salut. Charles en l’apercevant se prend à songer.

« Quel est donc le désir qui me pousse à faire du bien à cette femme infidèle ? Déjà sous les murs de Carcassonne, je fis preuve de clémence envers dame Carcas. Pourquoi m’entêter à donner à ces femmes une éducation chrétienne pour qu’elles choisissent de leur plein gré à recevoir le baptême ? Pourquoi donc ne puis-je leur imposer de force ? Mon cœur se laisserait-il prendre aux charmes féminins des belles sarrasines ? » .

Ce récit rapporte sans équivoque, la nature de ces rapports avec les deux souverains de Saragosse et de Carcassonne et leurs épouses. Girard II a probablement souhaité évoquer le thème du choix de la conversion au Christianisme, offert aux vaincus.

Symbolisme de la » Frise de Roland »

Nous développons à présent de nouvelles théories sur la compréhension de l’œuvre connue sous le nom de la Frise de Roland. Sans vouloir absolument imposer ce point de vue que certains jugeront discutable, nous pensons que ce panneau retrace un épisode des croisades carolingiennes, lié à la Chanson de Roland. Afin d’éclairer le lecteur, nous apportons comme éléments supplémentaires, deux indices troublants recueillis dans notre étude toponymique sur la venue de Charlemagne et l’installation des Arabes en Charente après 732.

Sur la commune de Rioux-Martin, nous avons relevé sur le cadastre de l’année 1836 en Section A, un lieu-dit, prénommé Carcassonne. A Touvérac dans le sud Charente existe un village portant le nom de Carcassonne, en section B. De même, sur la commune de Brie La Rochefoucauld, se trouve sur le cadastre de 1830, en section H, un lieu-dit, appelé Tartassonne. Tartassonne, Carcassonne la consonance est si proche que l’on pourrait supposer qu’à une époque indéterminée, la lettre T remplaça la lettre C, suite à une erreur de copiste. Ces faits s’ils ne constituent pas des preuves formelles, n’en évoquent pas moins des faits troublants, rappelant que des contingents de population arabe originaires de Carcassonne et du sud de la France, ont pu s’installer sur notre sol charentais, après la défaite de Poitiers, en 732.

Girard II en l’inscrivant sur le panneau sculpté aurait ainsi voulu matérialiser un autre aspect de sa politique de lutte contre l’envahisseur Arabe. En affichant à la face de tous, fidèles et infidèles résidants en Charente, ces récits de victoires chrétiennes sur le monde musulmans, il clamait le bon droit de la chrétienté à défendre ses territoires, ses royaumes, ses populations et ses valeurs chrétiennes.

Dans cette référence à la reddition de Carcassonne, il informe les populations musulmanes vivant en Charente, que même les grands seigneurs arabes installés sur le royaume de Charlemagne, reconnaissent comme seule religion, la religion chrétienne.

Charlemagne dans sa grande mansuétude, savait ainsi reconnaître et récompenser ceux qui se convertissaient et embrassait sa foi de leur plein gré, comme Dame Carcas à Carcassonne et Bramimonde à Saragosse.

Personnification Symbolique des Chevaliers de la « Frise de Roland »

Girard II lorsqu’il commandita cette œuvre, glorifia les nobles chevaliers et grands seigneurs qui participèrent depuis Charlemagne aux croisades d’Espagne, pour délivrer le tombeau de Saint-Jacques à Compostelle. Il rendait ainsi hommage à ces preux qui se croisèrent pour l’Espagne et la Terre Sainte.

La Frise est une stèle commémorative dédiée aux guerriers chrétiens du Moyen Age, tout comme nous en avons élevé, pour nos combattants de la guerre

1914/18, 1939/45 et les suivantes. Elle honore les preux chevaliers de la noblesse angoumoisine et régionale.

Par cette sculpture, Girard II saluait leur abnégation, bénissait leur tête de la grâce divine, et déposait sur leur chef, la couronne de martyr. A quels grands seigneurs de la région revenait l’insigne honneur d’une telle marque de reconnaissance.

A) Symbolique du Panneau de Gauche - « Roland et le Géant Ferragut »

1°) Hypothèse N°1 : La Maison Comtale D’Angoulême : Guillaume III Taillefer

Pour mieux saisir la compréhension de l’idée que nous allons développer, il faut se pencher de nouveau sur le thème et les actions exprimés par l’artiste médiéval.

Dans le premier panneau nous voyons un cavalier transpercé de part en part par son adversaire. Dans l’histoire des Comtes d’Angoulême seul le Comte Guillaume III Taillefer exécuta un tel prodige . La chronique angoumoisine raconte que ce grand seigneur transperça de sa lance, le haubert et le bouclier d’un ennemi et que de son vivant jamais il ne fut renversé de son cheval.

Il semble que Girard II ait choisi d’immortaliser cette prouesse chevaleresque dans la pierre, rendant ainsi hommage aux seigneurs de la maison d’Angoulême. Il est probable également qu’il est voulu honorer le pèlerin qu’il était. Guillaume se croisa. Il se rendit en pèlerinage à Jérusalem et mourut sur le chemin du retour, à l’abbaye de Deutz, dans le diocèse de Cologne en Allemagne.

Pour glorifier cette expédition en Terre Sainte, l’église chrétienne d’Angoulême immortalisa son seigneur et maître, qui servit la cause religieuse des croisades jusqu’au sacrifice suprême.

2°) Hypothèse N°2 : « Girard II D’Angoulême/Turpin de Reims et le Géant Abîme »

Dans notre exposé relatif au panneau de droite nous avons émis l’idée qu’il y avait superposition symbolique de la représentation des personnages. Nous confirmons ici cette hypothèse en justifiant nos propos sur les faits suivants. Turpin et le Géant Abîme. Girard II n’est autre que le Turpin de la Chanson. Il s’identifie au célèbre évêque, afin d’accéder à la postérité. Il souligna au travers de cette œuvre, quelle fut sa participation dans le combat opposant le monde chrétien à l’expansion musulmane en Ibérie et dans le sud de la France. Il rappelait la lutte qu’il menait en Aquitaine, afin d’envoyer des renforts militaires aux rois catholiques d’Espagne.

Selon notre opinion, le panneau de gauche de la Frise, est une manifestation artistique dévoilant un courant de pensées religieuses, qui puise sa source à la fois dans les faits militaires de Guillaume III Taillefer et dans le rôle politique joué par le légat du Pape en Aquitaine, l’évêque Girard II d’Angoulême.

La Frise de Roland est une œuvre reposant sur trois courants de pensées :

a) le Devoirs de la Chevalerie envers la religion, face à la menace musulmane

b) le Rôle et les engagements politiques des hommes de religion dans les affaires militaires et civiles au Moyen Age.

c) La Chanson de Roland est un manifeste politique et religieux précisant le rôle des uns et des autres sous le couvert de sa rédaction poétique.

Ainsi, les aventures épiques de la Chanson de Geste et de la fresque, que nous ont laissé les artistes du Moyen Age sur la façade de la cathédrale Saint-Pierre, ne sont que la matérialisation artistique d’un courant de pensées idéologiques, s’adressant aux gens de haut lignage possédant l’instruction pour la compréhension de la Geste, alors que le second thème exposant des faits concrets, sculptés dans la pierre s’adresse à des individus de petite condition sociale et illettrés, à qui il fallait une image palpable pour comprendre les enjeux de la croisade et la nécessité de se croiser.

L’Evêque d’Angoulême sut une fois encore faire passer son message parmi la population. Il était indispensable qu’elle vienne renforcer les armées seigneuriales qui partaient en Espagne.

3°) Hypothèse N°3 : « Roland et le Géant de Ferragut »

Cette nouvelle référence symbolique se superpose à la précédente toujours dans le cadre de la Chanson de Roland et met en scène Roland et le Géant Ferragut.

Le support artistique de la Frise, comme l’on indiqué avant moi plusieurs auteurs, est Roland, le héros de la Chanson de Geste. Tout au long du chemin de Compostelle espagnol, appelé le « Camino Francès », nous retrouvons ce thème sur les chapiteaux sculptés des églises romanes. Estella, Navarette et Villamayor de Monjardén conservent, sculpté dans la pierre, le souvenir de la lutte qui opposa Roland au Géant Ferragut.

Ce troisième volet de notre trilogie rappelle les liens qui existent entre notre bonne ville d’Angoulême et Santiago de Compostela. Les artistes, des compagnons tailleurs de pierre, imagiers et pèlerins le plus souvent, connaissaient ces hauts lieux de l’histoire sainte du pèlerinage de Saint-Jacques. Informés du rôle rempli par les ducs d’Aquitaine et leurs vassaux, ils exécutèrent d’après les détails fournis par Girard, ce bas-relief retraçant leurs exploits et ceux des deux principaux héros de la Chanson de Roland, d’après la Geste, les chroniques et les légendes qui jalonnaient et jalonnent aujourd’hui encore le Camino Francès.

La joute des cavaliers qui s’affrontent face à face retrace un épisode de l’affrontement que se livrèrent Roland et Ferragut. Cette expression artistique importée probablement d’Espagne par les artistes compagnons pèlerins que ramenèrent les ducs d’Aquitaine ou les seigneurs de l’Angoumois, illustre le profond attachement culturel de notre région avec le pèlerinage compostellan.

B) Symbolique du Panneau Central - « Charlemagne contre Aigolant/Ballak /Marsile»

1°) Hypothèse N°1 : « Le Combat de Charlemagne et Aigolant »

La pseudo-chronique du Turpin Saintongeais nous dévoile les péripéties de la course poursuite à laquelle se livrèrent Charlemagne et Aigolant en Angoumois, Aunis et Saintonge. Le Saint Empereur traque sans relâche le renégat sans jamais réussir à l’attraper. Il le pourchassa, mais chaque fois à l’issu de la rencontre, il lui échappait.

Aigolant le harcèle inlassablement, le nargue et manque même le tuer à la bataille de Champdolent.

Les deux ennemis se rencontreront plus tard près de Baignes, mais Aigolant parviendra à fuir une nouvelle fois. Charlemagne se retrouvera confronter une dernière fois avec le prince musulman et le tuera au pied de la Sierra del Perdon, près de Puente La Reina.

Nous sommes de nouveau sur le Camino Francès, Chemin qu’empruntent les Jacquets. Etrange coïncidence cette relation qui unie le destin de la Charente, le pèlerinage de Compostelle, Charlemagne et Aigolant.

Nous pensons que le panneau de droite opposant le personnage couronné et le fuyard immortalise Charlemagne poursuivant son vieil ennemi Aigolant et qu’il l’occit en territoire espagnol.

Cette image montre un cavalier portant une couronne. Il ne peut s’agir que d’un homme de haut rang. Le sculpteur a voulu différencier ce chevalier des autres cavaliers de la fresque. En le couronnant, il nous informe qu’il s’agit d’un grand seigneur, probablement d’un roi, très certainement les deux. Nous savons que l’artiste exécutait une œuvre commanditée par l’Evêque d’Angoulême qui voulait donner à ce bas-relief une définition spirituelle et politique. Il transporta la volonté épiscopale dans l’ornementation de la Frise. Nous retrouvons ces reliefs sculptés, ayant pour thème Roland, sur les chapiteaux des églises romanes espagnoles, comme nous l’avons indiqué précédemment.

La façade de la Cathédrale Saint-Pierre évoque ici une page de l’histoire carolingienne en Charente et en même temps en Espagne prouvant l’attachement de l’église charentaise à la délivrance du tombeau de Saint-Jacques de Compostelle.

2°) Hypothèse N°2 : « Le Combat de Charlemagne contre Marsile et Balaak »

Nous avons retracé cet épisode dans notre commentaire sur le panneau de droite « Cité des Femmes ». Nous pensons que ce décor évoque un autre engagement entre Charlemagne et les roi Marsile de Sarragosse et Balaak de Carcassonne. Comme dans le premier exemple, Charles tue ses ennemis et s’empare de la cité après leur capitulation. Nous trouvons cette explication plausible pour comprendre le dernier triptyque du panneau de la Frise de Roland.

3°) Hypothèse N°3 : « Les Ducs d’Aquitaine et la Reconquista»

Nous avons établi dans la description du panneau de gauche, une relation, existant entre la Chanson de Roland et la chronique des seigneurs d’Angoulême. Comte et Préfet des Marches de Bretagne pour le premier, Comte d’Angoulême pour le second, Girard utilisa les exploits chevaleresques de l’un et de l’autre, pour embellir un monument de notre patrimoine charentais.

Dans cette nouvelle explication, nous faisons le rapprochement entre les personnages de hauts rangs qui en rapport avec la Geste se couvriront de gloire au-delà des Pyrénées pour la délivrance du Tombeau de Saint-Jacques de Compostelle. Notre première remarque relève le fait suivant.

Le personnage principal du panneau de droite contrairement à celui de gauche porte une couronne. Nous voyons dans ce témoignage que nous ont laissé Girard II et l’artiste, la représentation des Ducs d’Aquitaine, Guy Geoffroy VIII et Guillaume IX le Troubadour.

Le premier s’illustra à l’appel du Comte de Barcelone, Raymond Béranger, sur-le-champ de bataille à Barbastro. Passant par la Gascogne, Guillaume VIII en profite pour mâter l’esprit de rébellion qui animait le Comte d’Armagnac. Le 7 mai 1063, Bernard Tumapaler s’oppose à Guillaume VIII près de l’abbaye de Saint-Jean de la Castelle, sur la commune de Benquet entre Mont-de-Marsan et Grenade dans les Landes, et subit une terrible défaite. Le comte d’Armagnac garda la vie mais perdit son titre de Duc de Gascogne. La Gascogne soumise, il pénétra avec son armée en Espagne. C’était la première fois qu’une armée française venait combattre sous l’étendard espagnol pour la gloire de l’Apôtre Jacques, faisant de cette campagne militaire la première véritable croisade contre les infidèles.

Girard II immortalisa cette expédition et cet exploit sous le ciseau du sculpteur. Les traits symboliques du second personnage de notre trilogie nous sont dévoilés ici.

Le dernier acteur de ce décor n’est autre que son fils, Guillaume IX le Troubadour, Comte de Poitou et Duc d’Aquitaine. La croisade qu’il entreprit en Espagne lui fut probablement conseillée par le légat du Pape. Son attitude peu respectueuse envers le Pape Calixte II lorsqu’il vint dans ses états, ombragea les excellents rapports qui régnaient entre la grande abbaye de Cluny et la maison d’Aquitaine. Le nouveau pontife qui se trouvait à Cluny lors de son élection n’apprécia guère le mépris ou l’indifférence avec laquelle le traita Guillaume IX et lui en fit certainement la leçon. Lorsque le Duc, mari volage, abandonne femme et enfant, le pape qui se trouve en concile à Reims en septembre 1119 le sermonne de nouveau. La rupture et la sentence d’excommunion sont proches. Pour restaurer son image il ne lui reste plus qu’à se croiser. Il part avec six cents chevaliers et rejoint l’armée du roi d’Aragon, Alphonse le Batailleur. L’ost prend Daroca, passe à Navarrete, étape du chemin de Saint-Jacques sur le Camino Francès, franchit les montagnes par un défilé et campe près du village de Cutunda. C’est ici que Guillaume appliqua le plan de bataille arabe contenu dans la Chanson de Roland et vengera la défaite de Roncevaux.

C’est en hommage à cet exploit, tirant son inspiration de la Chanson de Roland, que l’évêque d’Angoulême a souhaité faire revivre dans la pierre cette épopée.

Heureusement les troubles des guerres de religions et de la révolution de 1789 n’ont pas dégradé cette œuvre exceptionnelle, conçue par un grand esprit du Moyen Age.

La Frise de Roland est le testament de l’évêque Girard II D’Angoulême laissé à la postérité.

C) Symbolisme de la Trilogie du Panneau de Gauche

Cette sculpture dite de « Roland et Ferragut » symbolise trois personnifications historiques dans l’essence de la pensée littéraire médiévale :

1. Roland de Roncevaux luttant contre le Géant Ferragut, est le duel du bien contre le mal.

2. Turpin de Reims/Girard II d’Angoulême combattant le Géant Abîme, c’est le combat de deux cultures, de deux religions, la chrétienne contre la musulmane.

3. Guillaume III Taillefer, Comte d’Angoulême, symbolise la foi. Il fut à la fois croisé et pèlerin. C’est un de ces exploits militaires qui paraît avoir servi de modèle au sculpteur selon les directives de l’évêque d’Angoulême.

Voici selon nous l’interprétation symbolique du panneau de gauche que nous avons appelé « Roland et Ferragut ».

D) Symbolisme de la Trilogie du Panneau Central

Ce motif appelé « Charlemagne contre Aigolant/Balaak/Marsile » symbolise le rôle militaire joué par les grands seigneurs depuis le tout début des croisades d’Espagne. Charlemagne, Guy Geoffroy Guillaume VIII, Guillaume IX sont les seigneurs de haut lignage, ce qui explique que le guerrier du panneau central porte une couronne. Celui-ci rappelle les liens d’amitié qui unissaient les souverains espagnols, au royaume franc et au duché d’Aquitaine. Cette sculpture montre avec quel panache et bravoure Charlemagne et les Ducs d’Aquitaine affrontèrent les rois musulmans et leurs armées d’infidèles.

E) Symbolisme de la Trilogie du Panneau de Droite

Cette dernière œuvre symbolise la victoire du monde chrétien sur la civilisation musulmane, des succès à la fois militaire et religieux :

1). L’implication de la cité d’Angoulême dans la lutte contre l’envahisseur musulman en Espagne tout au long de la Reconquista

2). Les redditions de Saragosse et Carcassonne obtenues par Charlemagne,

3). Les défaites de Barbastro et de Cutunda infligées par les Ducs d’Aquitaine,

4). La conversion à la religion chrétienne de la Reine de Saragosse, Bramimonde, et de Dame Carcas, souveraine de Carcassonne.

Nous retrouvons à l’origine de chacun des triptyques l’atmosphère de la Chanson de Roland. Peut-être Girard II a-t-il voulu créer une sorte de trinité, un peu à l’image de Dieu, qui conserve encore aujourd’hui son mystère.

Les théories nouvelles développées dans notre étude éclairent d’un jour nouveau le secret de la Frise de Roland. Nos explications ne nous semblent pas plus invraisemblables que celles avancées jusqu’à présent. Nous pensons avoir approché la vérité, la nôtre, car bien sûr chaque individu à la sienne propre, et selon sa culture, ses croyances et ses cheminements intellectuels, chacun pourra trouver dans ce bas-relief des interprétations différentes et strictement personnelles.

Néanmoins nous avons tenté de pénétrer les pensées philosophiques et politiques de l’évêque Girard II d’Angoulême, en nous imprégnant de l’atmosphère des XIe et XIIe siècles, contemporaine de ce grand architecte. Nous espérons avoir réussi à restituer dans notre étude cet esprit chevaleresque qui animait les grands courants de la pensée médiévale et harmonisait la vie au Moyen Age.

F) Symbolisme du Cycle Epique de la « Frise de Roland »

A l’introduction du cycle dédié au thème de Roland et aux croisades carolingiennes en Espagne, exprimés sur les monuments religieux du début du XIIe siècle, font écho, dans les faits historiques à l’apparition d’exploits légendaires. L’art chrétien, la religion, le culte sont fortement imprégnés de cet esprit chevaleresque. Le Bien et le Mal dans la galerie architecturale s’affrontent par guerriers interposés, armés de pieds en capes. Les chevaliers de la Fresque de Roland luttent avec leurs lances et leurs épées symbolisant la vertu triomphant du vice.

La présence d’un étendard au centre de la Frise n’est pas un acte anodin voulu par l’artiste. S’il appartient au décor, il n’en est pas un car il partage en deux la frise. Au XIIe siècle, l’étendard caractérise les grands capitaines ou chefs de guerre. Il indique dans la frise, que des guerriers chrétiens valeureux et redoutables s’affrontent. Cette bannière ou gonfanon est un guide spirituel. Il représente la religiosité de l’action. Souvent il était offert par un personnage religieux influent, le Pape, son légat ou un évêque lors d’une cérémonie qui se déroulait avant le départ pour la croisade. Dans l’iconographie, celui qui en est frappé à pour châtiment la mort.

Dans la Chanson de Roland, avant la bataille finale contre les vainqueurs du Comte des Marches de Bretagne, l’oriflamme de Charlemagne est assimilée à une relique que l’on expose aux regards de Chrétiens et des Musulmans. Il est dit : « Geoffroy d’Anjou porte l’oriflamme. Elle avait appartenu à Saint-Pierre et s’appelait Romaine. Mais ici elle prit le nom de Montjoie. »

Que de symbolisme dans ces quelques mots. Nous y retrouvons Saint-Pierre mais également le cri de ralliement et d’encouragement poussé par les pèlerins de Saint-Jacques sur la route de Compostelle. L’oriflamme de la Frise de Roland rappelle tous ces épisodes de la religion et de l’histoire et montre les liens étroits qui unissaient Angoulême, ses évêques et ses seigneurs, à Rome, mais également au Tombeau de l’Apôtre Jacques à Compostelle.

Enfin Girard II en concevant l’esprit de cette frise a très certainement voulu rendre par l’implantation de cette oriflamme sacrée, un hommage au vénérable saint patron d’Angoulême, Saint-Pierre.

Nous assistons de plus en plus fréquemment à des attaques de corps à corps. Attaques frontales ou assauts désordonnés sont menés, les chevaux au galop, la lance tenue avec fermeté, l’avant-bras lancé en avant. Le choc est terrifiant comme l’exprime la Frise, le guerrier touché est projeté en arrière et va être désarçonné sous le coup mortel. Les personnages représentés appartiennent à la caste des chevaliers, les seuls dignes de brandir la lance. Ils portent, casque, couronne et cape, cela les différenciait de leurs ennemis qui sont de haut lignage comme le laisse supposer l’harnachement de leurs chevaux. Les combattants portent un casque, quelquefois doté d’un nasal, la cotte de mailles ou d’écailles protégeant tête, tronc et bras comme cela était en coutume à l’époque de Charlemagne. Ce qui fait la particularité du second duel où le chevalier couronné terrasse son ennemi est le type d’arme qu’il manie. Il semble qu’il pratique le maniement de la lance en arrêt. Ce type qui se généralise au XIIe siècle s’utilise ainsi. Celle-ci est bloquée sous l’aisselle au moment de l’assaut lui offrant à l’instant de l’impact force et vitesse sous l’effort conjugué du cavalier et de son destrier permettant une force de pénétration puissante et souvent irrémédiable pour l’ennemi. Abondamment pratiqué par les Chrétiens dans les combats de front, cette tactique militaire considérée comme imparable était très redoutée des Musulmans.

La cotte de maille au cours du XIIe siècle va remplacer celle d’écaille et s’allonger. Elle va couvrir la tête, les bras et le bassin dans un premier temps, pour couvrir totalement le corps de la tête aux pieds vers 1170. Seul le visage restera découvert en partie.

En prenant les attributs du guerrier, Turpin de Reims/Girard d’Angoulême, les « defensor ecclesiae » dans l’iconographie de la Cathédrale d’Angoulême contribuent à la diffusion du culte et de l’image de Saint-Jacques en Charente. Saint Chevalier, défenseur de la foi, les nombreuses apparitions de Saint-Jacques ont maintes fois soutenu les croisés d’Espagne, les pèlerins dans la guerre contre les infidèles et leurs dangereux périples vers Compostelle. Turpin et Girard symbolisent l’espérance qui s’offre à ces guerriers qui vont aller se battre au nom de la foi. Ils obtiendront le pardon divin en rémission de leurs péchés, s’ils parviennent à se libérer des haines et des passions qui les animent, en remettant leurs vies entre les mains de l’Eglise et de Dieu.

Le cycle épique contenu dans l’iconographie de la Frise de Roland exprime toute la force de la pensée religieuse, dans la société féodale du XIIe siècle, celle-là même contenue dans le serment de chevalerie que tout chevalier s’engageait à respecter tout au long de sa vie en jurant sur les Saints Evangiles :

« Je promets et fait serment, en présence de mon Dieu et de mon Prince, par l’imposition de mes mains sur les Saints Evangiles de garder soigneusement toutes les lois de notre bonne chevalerie. »

CONCLUSION

En conclusion de notre étude sur, « La Pseudo Chronique de Turpin et La Canso d’Antiocha », en terres charentaises, ainsi que sur la « Frise de Roland » bas-relief de la Cathédrale Saint-Pierre, nous constatons que la « Chanson de Roland » et les multiples campagnes guerrières menées par Charlemagne en Espagne eurent sur les populations de Saintonge et de l’Angoumois un impact qui s’imprima dans les mémoires et perdura tout au long des siècles.

Cette influence se manifesta sur l’art, la littérature et nous considérons que ces sculptures sont en rapport direct avec les épopées épiques, contée dans la « Chanson de Roland » (1100-1125), le « Pseudo Turpin » (vers 1150), la « Canso d’Antiocha » (entre 1130 et 1145) de Grégoire Bechada et tous les autres textes des chansons de geste évoquant les croisades et campagnes carolingiennes qui servirent à la construction du texte d’Oxford.

La « Nota Emilianense » trouvé au monastère de San Millan de Cogolla, qui date des années 1065-1075, résume un poème de source espagnole la « Cantar de Rodlane » plus ancien que la version d’Oxford découverte en 1832 et écrit probablement après 1086. Il faut retenir qu’aucun document contemporain au désastre de Roncevaux ne mentionne la présence de Roland. Cette apparition n’interviendra que tardivement à l’évènement historique.

Ces différents textes décrivent l’épopée des croisades carolingiennes au VIIIe siècle, mais parmi toutes les chansons de gestes retrouvées aucune n’égale la beauté lyrique de la « Chanson de Roland ».

Elle évoque à la fois le patriotisme français, les vertus chevaleresques, le dévouement à son pays, sa religion et à son roi.

L’histoire et les acteurs représentés dans ce triptyque de la cathédrale d’Angoulême évoquent les mêmes valeurs. Elles concernent des seigneurs du royaume qui se battirent pour la délivrance du Tombeau de Saint-Jacques de Compostelle afin de marquer leur fidélité à leur souverain et à leur religion.

Les artistes espagnols qui l’avaient bien compris, embellirent de même façon leurs cathédrales et leurs églises sur le Camino Francès en Espagne.

L'ENIGME TUROLD

Mais qui fut le véritable auteur de la chanson ? Le dernier vers donne une signature, - « Ci fait la geste que Turoldus déclinet »

Celui-ci est-il bien l’auteur d’origine ou l’un des scribes qui écrivirent au cours des siècles suivants des passages du texte que nous connaissons. Ne serait-il pas également le dernier intervenant, « un remanieur », à avoir rajouté quelques vers sur quelques passages historiques romancés.

Quoi qu’il en soit, ce Turold demi-frère de Guillaume le Conquérant, pourrait bien être le véritable auteur si l’on en croit plusieurs témoignages qui rapportent qu’une « Cantilena Rollandi » fur chantée dans les rangs des armées normandes à la bataille d’Hasting (1066)) par un jongleur nommé Taillefer.

Turold de Fécamp ou de Peterborough fut successivement, moine à Fécamp, chanoine à Bayeux, Abbé de Malmesbury et enfin Abbé de Peterborough où il meurt en 1098 . Ce moine chevalier n’est-il pas l’évêque Turpin de la chanson de geste ? Il se pourrait bien qu’il s’identifia à ce héros malheureux.

Girard II ne rêva-t-il pas d’être ce Turpin charentais, lui qui s’engagea corps et âme dans la bataille de la Reconquista. Normand de naissance, né à Blay vers 1060 et mort vers 1136, dans le diocèse de Bayeux, il sait probablement imprégné des scènes de la « Tapisserie de Bayeux » pour imaginer la sculpture de la frise de la cathédrale Saint-Pierre. Il connut vraisemblablement ce Turoldus qui devint son héros.

La tradition populaire à essaimée de nombreuses légendes rolandiennes en Aquitaine et principalement en Gironde (Belin, Bordeaux, Blaye), Charente Maritime et Charente.

Le diocèse de Bordeaux, proche de la Charente relate dans son histoire religieuse, d’innombrables scènes légendaires en relation directes avec les campagnes carolingiennes en Espagne et les héros de la « Chanson de Roland ».

Girard II évêque d’Angoulême et légat du pape, infatigable prêcheur, poursuivra sa mission de recrutement. Le pape Pascal II réunira un concile pour opposer aux envahisseurs musulmans les armées chrétiennes. A cette fin, il demanda aux évêques d’entraîner la chevalerie française à se rendre en Espagne pour lutter contre les troupes arabes. Ils revêtiront pour cette occasion, un nouvel insigne, celui de la « Croix Blanche » pour les distinguer des croisés à la « Croix Rouge ». Girard II sera l’un des grands organisateurs de ce recrutement qui mènera les détachements régionaux chrétiens au succès. Les croisades ibériques auront un immense succès. L’unité chrétienne délivrera l’Espagne du joug musulman, unifiera les royaumes chrétiens espagnols et renforcera la position de la religion chrétienne sur l’échiquier international.

Barbastro en 1073 est une place forte vaincue par Sanche Ier Ramirez, roi d’Aragon et Guillaume VIII d’Aquitaine.

Cutunda, le 17 juin 1120, voit la victoire d’Alphone Ier d’Aragon et de Guillaume IX d’Aquitaine, sur les Almoravides.

Tudela, sera prise le 25 février 1119, par le roi Alphonse Ier d'Aragon « le Batailleur » et des croisés français.

Daroca, est conquise 'par Alfonse Ier le Batailleur et le duc d’Aquitaine Guillaume VII, en 1120.

Saragosse, où Alphonse Ier « le Batailleur », roi d'Aragon, multiplie les combats contre les Maures, parvient à s'emparer de la cité.

La bataille de Las Navas de Tolosa, en 1212, voit la victoire le lundi 16 juillet 1212, au lieu-dit « Castillo de la cuesta », de Pierre II d’Aragon secondé par les troupes de croisés de plusieurs nations européennes.

Toutes ces victoires sont gagnées par les armées des Rois chrétiens d’Espagne soutenues dans leurs conquêtes par la chevalerie d’Aquitaine et d’Europe.

C’est tout cela que l’évêque Girard a voulu transcrire sur la façade de la cathédrale. Le « Triptyque de la Frise » symbolise une trinité historique contenue dans chacun des panneaux du bas-relief. Girard II d’Angoulême a réussi nous semble-t-il, le prodige d’associer, par superposition, des faits historiques, des lieux et des hommes, vivant à des époques différentes, autour d’un thème artistique cher à la littérature médiévale, la Chanson de Roland.



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