FOUQUEURE L'Aqueduc de la Font du Frêne
Date : Vendredi 01 juillet 2011 @ 15:59:40 :: Sujet : MOYEN AGE
FOUQUEURE
L'Aqueduc de la Font du Frêne
Introduction
L'étude de l'Aqueduc de la Font du Frêne à Fouqueure, fut réalisée par le GRAHT, au cours de l'été 2005 . Découvert par M. Bernard Coteau cours d'une prospection, il fut reconnu sur une grande partie de son tracé. Le présent résumé retrace les différentes phases de ce travail et décrit les techniques de construction se rapportant au monument.
Les intervenants furent au nombre de trois.
M. Bernard Cote, inventeur du site. M. Claude Brège, Bénévole, M. Daniel Bernardin, Président du GRAHT.
FOUQUEURE (Charente)
La Terne L’Aqueduc de la Font du Frêne
Implantation de l’aqueduc
Découvert en prospection pédestre L’aqueduc de la Grande Combe serpente dans la vallée du même nom à flanc de coteau. Il semble qu’il acheminait les eaux de la Font de Frêne captée dans le Bois de l’Aiguille à la côte 99 de la carte IGN. La toponymie locale indique quelle s’écoulait probablement dans ce qui se nomme aujourd’hui Fossé de la Font de Frêne. Ce fossé traverse la Grande Combe et atteint le village de La Terne. Il passe sous la D739 et se poursuit dans la « Prairie des Lacs » en direction probablement de la Charente. Dans son ouvrage la Carte Archéologique de la Gaule, Christian VERNOU rapporte l’existence de vestiges gallo-romains au lieu-dit « Les Bourriges ».
Patrick F. JOY signale un site recensé sous le N° 688 et adressé au SRA en 1998. Répertorié lors d’une prospection aérienne, il dresse la carte d’un tracé d’aqueduc parut dans la Revue d’Histoires du Pays d’Aigre n° 3 sous le nom de « L’Aqueduc de Fouqueure ». Ce fossé correspond comme l’indique Patrick F. JOY au tracé de l’aqueduc de Fouqueure. A hauteur du lieu IGN « Chaumes de Sainte-Radegonde » il indique à partir de la lettre « e » un tracé en pointillé non reconnu qu’il avoue voir apparaître parfois dans les champs lors de labours d’automne. Ce tracé semble correspondre au monument que nous avons découvert et que nous décrivons. Au premier abord il semble y avoir une corrélation entre cet aqueduc et celui faisant l’objet de la présente étude. Toutefois les périodes historiques ne semblent pas concorder. Nous nous efforcerons tout au long de notre exposé de décrire la nature du monument découvert qui ne nous paraît pas gallo-romain. Est-ce un ouvrage secondaire qui fut raccordé sur l’aqueduc gallo-romain à une époque beaucoup plus tardive, il nous faudra attendre une autre campagne de prospection au sol pour avoir une réponse définitive ?
Altimétries et linéaire
Les indications ne reposent pas sur le monument lui-même mais sur son implantation sur le terrain. Si l’on considère la source de la Font de Frêne comme origine de l’aqueduc à la côte 99, l’altimétrie reconnue à proximité de la D739 se situe à la côte 70, ce qui sur une distance de prés de 2 km 500 fait un dénivelé de prés de 40 m. La pente de l’aqueduc semble suivre les déclivités naturelles du terrain et celle-ci paraît être régulière. Néanmoins il serait nécessaire d’étudiée le profil de l’aqueduc depuis son origine jusqu’au bas de la vallée, afin de savoir si les deux vecteurs d’eaux, terrain et monument suivent un profil altimétrique identique ou si celui-ci diffère pour l’aqueduc, sur certaines sections aménagées de contre-pente.
Le linéaire de l’aqueduc de Fouqueure devait se poursuivre au delà de la D 739. Il suit une ligne à peu prés rectiligne de la source jusqu’au partage des vallées au point dit « Les Reganots ». Après ce partage des vallées il épouse légèrement les courbes de niveaux. Une étude scientifique du monument permettrait de connaître avec certitude la pente exacte de l’écoulement de l’eau dans l’aqueduc de Fouqueure.
Les matériaux
Les pierres locales
La roche locale disponible à proximité du monument dans la région mansloise a servi à construire l’aqueduc de la Grande Combe. C’est une roche calcaire facile à débiter qui se présente sous une forme assez massive en profondeur mais assez fracturée en surface. Sous l’action du gel elle peut éclater en feuille mince. Son extraction est assez aisée et sa taille ne présente pas trop difficulté. Elle est souvent employée dans les maisons des bourgs de la région. Les pierres entrant dans la structure du monument ont le plus souvent été équarries et sont d’un calibrage assez régulier. Les dalles de couvertures sont des blocs naturels utilisés le plus souvent en l’état en respectant une certaine homogénéité afin d’assurer une bonne étanchéité. Elles ne sont pas maçonnées tout comme les pierres des parois sur lesquelles il n’a été aperçu aucun liant. Les liants Au premier abord, il semble ne pas y en avoir eu. Aucun mortier n’a été aperçu sur la totalité du monument étudié. Il a peut-être disparu mais c’est assez étonnant qu’aucune trace n’en ait été relevée sur l’ensemble de son parcours. Nous pensons qu’il a peut-être construit selon le mode vernaculaire. Cette technique fort prisée déjà au néolithique dans la construction des mégalithes de la Boixe, forêt peu éloignée du site a déjà fait ses preuves. Mégalithes, Cabanes en pierres sèches ou lojhes sont construits selon ce principe. Le savoir s’est transmis durant des millénaires dans la région. L’étanchéité des monuments était assurée par un cailloutis soigneusement calibré qui assurait une isolation thermique et un colmatage empêchant les infiltrations. Néanmoins ce n’est pas une méthode parfaite pour ce type de constructions hydraulique.
Techniques de creusement et de mise en oeuvre
La technique du décaissage
Elle est employée dans le fond de la vallée dans la première partie du monument qui a été découvert. Il semble qu’un sol argileux sommeille à une faible profondeur sous une mince couche de terre. En effet en période de hautes eaux la vallée est inondée ce qui paraît corroborer cette hypothèse. La portion d’aqueduc qui serpente dans la prairie en bordure du coteau, est construite selon ce procédé. Dans ce secteur, le monument réduit à un simple caniveau laisse apparaître les dalles de couverture.
Le creusement en U
C’est la méthode qui semble avoir été utilisé dans le deuxième tronçon du monument qui remonte en direction de la source. Une tranchée de faible profondeur a été nécessaire pour servir d’assise à la construction de l’aqueduc. Les parois montées en moellons équarris s’appuyaient contre les cotés de la tranchées. Dans ce type de creusement les dalles de couvertures venaient buter contre le talus. Le creusement en galerie ou fossé C’est la technique retenue sur le dernier tronçon exploré. Un long fossé rectiligne renferme le conduit de l’aqueduc. Les cotés creusés en galerie dans la terre et le tuf calent les murets des parois. Le creusement est plus profond, plus large et plus élaboré que celui en U. Entre la dernière partie du monument et son profil qui semble s’étirer vers les hauteurs des chaumes de Ste Radegonde, se lit une trajectoire nette et précise du fossé qui ait creusé pour recevoir l’aqueduc. Au delà de cette limite il faut envisager sa présence ou ses vestiges sous la terre et l’humus. Une campagne de prospection au sol, si elle n’a pas été déjà faite devra être effectuée pour faire le relevé exact de ce monument dans son ensemble.
Description du tronçon d’aqueduc dans la prairie
Il s’étire au pied du coteau est de la prairie. Il se présente sous l’aspect d’un monument découvert longeant le coteau boisé depuis le pont de la D 739. Il mesure 62 m de long pour la partie qu’il a été possible d’apercevoir. Un second tronçon couvert, long de 47 m est en partie enfoui sous la terre. Une dalle de couverture absente à un endroit nous a permis de reconnaître un conduit fabriqué en moellons équarris non maçonné. Une dalle plate calcaire fermait le specus. Sa profondeur nous a paru faible malgré la terre déposée à l’intérieur. La largeur n’excède pas 30 cm. La dernière partie, toujours située dans la prairie mesure environ 42 m. Il n’a pu être reconnu facilement car il est recouvert de broussailles et de ronces. Il nous a paru couvert sur ce qu’il a été possible de voir.
Description du tronçon sous le chemin
Cette partie du monument est érigée à un changement de physionomie géographique. On change de vallée, l’aqueduc longe à présent le coteau ouest. Le chemin sert de partage entre les vallées et la transition monumentale s’opère à cet endroit. Long d’environ 7 mètres, l’aqueduc traverse en souterrain le chemin de terre et il n’a pas été possible de voir ses éléments.
Description du tronçon à ciel ouvert
On l’aperçoit dés que l’on pénètre dans la nouvelle prairie. Il court sur le coté gauche à l’ouest. Il mesure 30 m de long et a perdu sa couverture. Son observation est malaisée car la progression est gênée par les ronces. A partir de cet endroit, l’ouvrage nous a paru plus massif et son architecture semble plus élaborée. Il nous donne l’image de ce que va être le tronçon de l’aqueduc couvert.
Description de l’aqueduc couvert
Construit contre un flanc de coteau il s’étire sur environ 55 m de long. Les dimensions internes se développent et il atteint presque 0,80 m de hauteur. La largeur avoisine les 40 cm. Il porte des pierres d’entablement qui supportent des dalles calcaires plates. Les moellons des parois sont probablement taillés et équarris. Ils sont réguliers et leurs formes montrent un calibrage assez parfait. Les rangs de pierres épaisses s’intercalent avec des rangs de pierres plates moins épaisses. Les parois de même hauteur ont un aplomb parfait. Les moellons sont proprement alignés à tous les étages et le parallélisme est précis. L’ensemble de l’ouvrage est monté sans mortier. Le calage est réalisé avec des éclats de débitage ou de la pierraille. Le sol du specus est jonché de moellons équarris provenant de la destruction en amont et qui ont été transportés par les eaux dévalant le dénivelé. L’architecture du monument est ici parfaitement lisible.
Description du tracé de l’aqueduc détruit ou fossé
C’est la dernière section que nous avons aperçue. Elle s’étend sur une cinquantaine de mètres. Dans ce tronçon il ne subsiste aucun vestige d’architecture. Seul apparaît le profil en fossé du conduit de l’aqueduc. Il se distingue nettement dans la géographie de la vallée. Il conserve son creusement profond et large qui est envahi par la végétation mais facile à reconnaître.
Conclusion
L’étude de cet aqueduc nous montre différentes techniques de creusement et nous renseignent sur la méthode de construction utilisée à Fouqueure à tous les âges par la population locale depuis les temps les plus reculés. Compte tenu des observations relevées sur le site en plusieurs points nous émettrons des réserves sur sa datation. En effet il faudrait poursuivre les recherches pour savoir de quel endroit il vient. Son antiquité dans l’état actuel des recherches ne peut être envisagée. L’absence totale de mortier de tuileaux et de mortier tout court ne permet pas de le rattacher à l’époque gallo-romaine. Ce mode de construction rappelle le principe de construction vernaculaire très usité dans le nord Charente. La source du Vallandeau à Cellettes, le puits de Nanclars et la fontaine de Coulgens sont construits selon cette méthode. Une prochaine campagne de prospection nous amènera à la source de la Font de Frêne et peut-être auront nous la réponse à cette question. Il n’en reste pas moins un des ouvrages hydrauliques charentais très intéressant. Compte tenu des travaux que nous avons réalisé avec Bernard FABRE, Bernard COTE et Jean-Marie TEXIER sur les constructions vernaculaires en Charente nous pensons que c’est tout de même un monument qui pourrait appartenir au Moyen Age ou à la fin de cette période historique. Nous devrons également reconnaître le monument dans la totalité de son tracé. Peut-être est-il un ouvrage qui aurait pu être « branché » sur un aqueduc plus ancien ? Peut-être son antiquité apparaîtra-t-elle en un autre point lors d’une prochaine campagne de prospection ? Ce sera le but que nous poursuivrons afin d’en savoir un peu plus sur ce monument.
(Responsables de l’opération : Daniel Bernardin, Claude Brège, Bernard Cote).
Christian VERNOU, Laudine VERNOU-MAGISTER, José GOMEZ de SOTO,
Carte Archéologique de la Gaule : La Charente
1993 |